Cédric BUGNON 25 novembre 2024 Divers


Swiss Cycling oublie (encore) les romandes

Nexetis, équipe UCI lancée par Swiss Cycling, formera des étrangères. Mais pas de romande.

© KEYSTONE / Til Buergy

En marge des championnats du monde de Zürich, Swiss Cycling avait annoncé la création d'un équipe UCI continentale ayant pour mission d'éviter aux Suissesses prometteuses de devoir s'expatrier pour progresser, ce qui est louable. Ce lundi 25 novembre, la composition de cette équipe nommée étrangement NEXETIS a été révélée lors d'une conférence de presse. Sans surprise, l'équipe est 100% germanophone.

Malheureusement, l'une des figures de proue de la relève est romande : la Fribourgeoise Léa Stern a terminé en tête du classement national 2024, a été la seule non-professionnelle à accompagner les meilleures dans le final des championnats suisses. Elle comptabilise en outre plusieurs podiums en France et en Belgique dans des courses nationales autrement plus relevées qu'en Suisse, avec plus de 120 participantes à chaque fois dont plusieurs équipes continentales.

Comme toutes les jeunes Suissesses, notre romande a accueilli avec enthousiasme et espoir la nouvelle de la création de cette équipe. Elle a manifesté son intérêt auprès de la fédération dans des e-mails restés lettres mortes. Bien sûr, elle a toujours conservé un plan B pour la future saison car, au fond d'elle, elle savait.

Elle savait qu'elle serait un élément dérangeant : une seule francophone au milieu d'une équipe (staff et coureuses) 100% germanophone, cela risque d'alourdir la communication, de prendre davantage de temps pour établir une cohésion. Doit-on sacrifier une athlète qui parle une autre langue pour le bien de l'équipe ?

Cette question ne devrait pas se poser pour une équipe financée entre autres par la fédération nationale. Chaque affilié de Swiss Cycling, qu'il soit romand, alémanique ou tessinois, finance indirectement le fonctionnement de cette équipe. Chaque athlète suisse devrait avoir les mêmes chances, basées uniquement sur des critères sportifs et éthiques, quelle que soit sa langue maternelle. La diversité linguistique devrait être vue comme une richesse au sein de notre fédération.

De la diversité, il y en aura tout de même : ''l'équipe qui va former la relève du cyclisme suisse féminin'' a décidé d'engager une athlète slovène et 3 athlètes japonaises pour compléter l'effectif ! Ainsi, notre Romande devra s'expatrier en Belgique, à ses frais, si elle entend continuer sa progression. Pendant que Swiss Cycling va payer la formation d'athlètes étrangères. Une situation humiliante qui aurait de quoi déstabiliser plus d'un athlète.

Et qu'en pense la principale concernée ? ''Mon impression, c'est qu'ils ne s'intéressent pas vraiment à moi. L'an dernier, ils ont par exemple justifié une non-sélection en m'expliquant qu'ils préféraient prendre une autre fille qui avait des résultats proches des miens. La raison : elle avait seulement 23 ans et débuté le vélo récemment, en 2020. Bon, moi, j'avais 22 ans et débuté le vélo en 2022... mais j'ai eu l'impression qu'ils me prenaient pour une trentenaire avec 10 ans d'expérience.''

Philosophe, elle préfère en rire : ''dans le vélo, je me sens chez moi partout, sauf en Suisse finalement, alors c'est peut-être pas plus mal''. Celle qui a également reçu des propositions en France et en Italie passera son année 2025 dans une équipe flandrienne, où la langue parlée par l'encadrement et les coureuses est le flamand, l'équivalent du suisse-allemand chez les Belges. Car en Belgique, on ne renonce pas à un talent au motif qu'on ne comprend pas parfaitement la langue qu'il parle. Assurément l'une des raisons qui font de la Belgique une nation cycliste hautement supérieure à la Suisse. Cette dernière aurait grand intérêt à s'en inspirer.


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