© MC Reylo |
Déjà présent au 3e rang du Swiss Bike Challenge lors de sa première édition en 2017, puis vainqueur de ce même Challenge la saison dernière, c'est en tant que ''retraité'' que le Neuchâtelois monte à nouveau sur le podium de ce classement récompensant la régularité. Une performance qui n'était pas forcément attendue en début de saison, même si le polyvalent coureur du Zeta Cycling Club avait prévenu qu'il n'arrêtererait pas le vélo à l'issue de sa dernière saison au niveau continental UCI.
Justin, te revoilà à nouveau sur le podium du Swiss Bike Challenge ! Et tu es le seul coureur du Top5 qui n'a pas disputé la moindre épreuve internationale. Comment as-tu fait pour te retrouver si bien classé ?
Je dirais que c'est grâce au coronavirus que je me retrouve si bien classé. J'étais parti en Nouvelle-Zélande l'hiver dernier et j'avais décidé de m'inscrire pour le Tour des Stations. L'objectif était simplement de finir car ce format de course particulièrement long m'était inconnu, et je devais me préparer un minimum. Mais je le faisais en roulant surtout pour le plaisir.
Puis, il y a eu le confinement pendant 2 mois. Sauf que là-bas, absolument tout était fermé, il n'y avait rien à faire. J'ai donc recontacté mes anciens entraîneurs pour leur demander de me faire des plans afin de structurer mes journées. Et j'en ai fait, des heures sur Zwift ! Au final je me suis retrouvé en excellente forme. Quand je suis rentré en Suisse, je me suis inscrit à quelques courses régionales et cela s'est vraiment bien passé : je les ai pratiquement toutes gagnées.
Certains de tes adversaires t'ont trouvé plus fort que jamais sur ces épreuves...
Oui, je pense que c'est lié au fait de ne pas avoir d'équipe cette année. Je cours moins, j'ai très peu de déplacements et il n'y a pas cette pression du résultat. J'y allais pour m'amuser, sans réfléchir et en pédalant uniquement avec le cœur. Cela aide ! Les années précédentes, parfois je réfléchissais trop et cela me faisait faire n'importe quoi. Cette année, tout était plus facile car il n'y avait aucune pression.
Tu dis qu'il n'y avait aucune pression, mais tu avais déjà évoqué l'objectif des championnats de Suisse du CLM lors de notre interview de la saison dernière !
Au final, dans ma tête j'avais un peu délaissé les championnats de Suisse du CLM pour me concentrer sur le Tour des Stations. Et d'un autre côté, j'avais aussi dit à tout le monde que j'allais disputer ces championnats. Et comme j'ai un beau vélo de CLM à la maison, autant le faire ! Puis en regardant la liste de départ, j'avais finalement quand même une sorte de pression.
Au risque de passer pour quelqu'un d'arrogant, en regardant la liste de départ en élite national je pensais que j'allais gagner. Surtout, je me disais que si je ne gagnais pas, j'allais être terriblement déçu. C'est comme pour les épreuves régionales : je sais que si je suis au départ, je suis forcément attendu pour la gagne, sauf peut-être si des coureurs comme Yannis Voisard sont aussi au départ évidemment. Et du coup, j'avais un peu de pression. J'étais là pour gagner, ce qui s'est heureusement produit au final.
Tu as évoqué le fait qu'il y avait moins de stress, pas de pression de la part d'une équipe. Mais est-ce qu'il y a des aspects de ta ''vie d'avant'' qui te manquent ?
Oui, quand même un peu. Notamment les courses par étapes où j'aimais surtout l'ambiance autour de la course. Partager ma chambre avec un équipier, se retrouver tous ensemble à table. Tout cet aspect extra-sportif et ces voyages bien trop longs qui nous faisaient râler tout le temps. Avec le recul, c'était quand même une période de ma vie que j'ai appréciée. Je ne sais pas si c'est un manque, mais j'y pense de temps en temps.
Cette saison tu as terminé sur le podium du Tour des Stations. Vas-tu persévérer sur les ultra-distances ?
Oui, je me suis déjà inscrit pour 2021. J'ai toujours apprécié ces efforts vraiment longs, dans la résistance. Cela me convient mieux que des petites bosses de 10-15 minutes où l'on a le goût du sang dans la bouche. Après cela demande tout de même beaucoup de temps pour s'entraîner, mais cela permet aussi plus d'écarts. Le programme est moins strict que ce que je connaissais les années précédentes.
Du coup, qu'est-ce qui va changer en 2021 ?
Le projet est un peu le même qu'en 2020, c'est-à-dire le Tour des Stations et quelques courses régionales. Après, j'ai repris mes études et j'ai moins de temps pour m'entraîner. Je termine mon master au mois de juin et je devrai ensuite trouver un job, ce qui veut dire qu'il y a encore pas mal d'incertitudes pour la 2e partie de saison. Je n'ai donc pas de plan définitivement établi mais en étant inscrit au Tour des Stations je conserve un but, ce qui est important. Je ne vais pas déjà remplir maintenant mon calendrier de courses. On verra sur le moment en fonction de la forme et de la motivation.
Ce qui est tout de même compliqué pour moi, c'est que je suis perfectionniste. Si je prends le départ d'une course, c'est forcément pour bien faire. Et si je sais que je ne suis pas performant car moins entraîné, j'ai plutôt tendance à ne pas prendre le départ. Encore plus si c'est une course régionale du fait de mes victoires ces dernières saisons. C'est assez difficile à expliquer : je n'y vais pas forcément toujours pour gagner, mais le jour où je ne serai plus en mesure de le faire, je sais que ce sera dur moralement pour moi.
En Suisse, la majorité des coureurs plaquent tout dès que leurs ambitions de professionnalisme semblent perdues, souvent dès la sortie des rangs espoirs. Toi, tu es encore-là. Est-ce que tu as un rêve, un grand objectif que tu espères encore accomplir dans le vélo ?
Non. Mon seul rêve, c'est de conserver cet amour que j'ai pour le vélo. J'espère ne jamais le ranger. Si je pouvais rouler au moins 10-12 heures par semaine pour le restant de ma vie sans que cela soit une contrainte, ça ce serait mon rêve ! Quand je vois mon père qui travaille, je me rends bien compte que ce ne sera pas facile. Tout est très différent quand on arrive dans ''la vie réelle''. Mon idéal serait de continuer à faire du vélo et à avoir du plaisir pour le restant de ma vie.