Cédric BUGNON 12 janvier 2021 Interview


Alexandre Balmer : ''bien finir mes années espoirs''

Le Neuchâtelois continuera d'associer la route et le VTT au sein de deux structures distinctes.

© Arcinfo

Le talent Neuchâtelois Alexandre Balmer a vécu une saison d'apprentissage sur la route après une saison 2019 consacrée à ses études, ne lui laissant du temps que pour la pratique du VTT. Démarrant en fanfare avec un titre de champion de Suisse U23 du CLM, le pensionnaire de la Continentale FDJ a découvert ensuite les courses par étapes avec un certain succès. Une saison prometteuse teintée d'une pointe de malchance.


Alexandre, tu as entamé ta saison par un titre de champion national du CLM chez les espoirs, on t'imagine très satisfait. Comment analyses-tu ta saison 2020 ?

J'ai effectivement très bien commencé sur le championnat suisse du CLM. Pendant le confinement, la météo était magnifique et j'ai vraiment bien pu travailler. Je suis également allé en camp à St-Moritz, ce qui m'a permis de bien me préparer. Ils ont annoncé la date de ce championnat seulement 3 semaines avant la course et mon vélo de CLM était au service course de la FDJ à Besançon. J'ai dû rapidement le récupérer et j'ai passé les 3 semaines à bien travailler en vue de cet objectif, même si jusqu'à cette course je n'avais jamais vraiment préparé un chrono.

Après, je crois que même si l'on est pas parfaitement bien habitué au vélo, cela ne fait pas beaucoup de différence. C'est la force physique pure qui compte. En rentrant de St-Moritz j'étais dans une période où je me sentais très en forme et très bien dans la douleur. J'ai aussi eu de la chance car je m'impose avec une seule seconde d'avance. Mon objectif était le podium, et j'avais une petite pression avant la course avec des spécialistes comme Joël Suter, Robin Froidevaux ou encore Mauro Schmid au départ.

Après, au niveau du bilan, c'était pour moi une année d'apprentissage. L'an dernier, je n'ai pas couru sur la route. C'était la première fois que je courais avec ''les grands'' et surtout que je devais courir en équipe. Par le passé, notamment chez les juniors, j'ai souvent dû me débrouiller tout seul ou presque. Ici, je devais courir en équipe, rouler pour les autres et pas forcément jouer la gagne. Je pense avoir beaucoup appris, mais il y a eu aussi un petit creux cette saison. Je n'ai pas eu beaucoup de chance en chutant plusieurs fois : sur le championnat d'Europe de CLM, sur le Baby Giro et sur la Ronde de l'Isard. Quand je me suis remis de ces chutes, j'ai repris par une deuxième place en Coupe du Monde VTT. À ce moment-là, je me sentais hyper bien. Je ne sentais plus la douleur, j'étais dans ''le flow''. J'ambitionnais la victoire sur les prochaines courses. Puis j'ai eu un souci de santé avec une infection virale qui a à nouveau contrarié mes plans.

On dira qu'il y a eu des résultats de qualité mais qu'il n'y a pas eu la quantité. C'était assez irrégulier. Il a fallu également gérer les demandes de mes deux équipes (ndlr : FDJ Conti en route et Thömus en VTT), gérer les nombreux déplacements et les demandes des sponsors aussi. Cela a engendré beaucoup de fatigue et pas mal de pression. Mais j'ai beaucoup appris.


Malgré tes 192 centimètres, tu termines 12e du Tour de Savoie Mont-Blanc. Une épreuve pour grimpeurs et ce lors de ta première participation à une course par étapes UCI...

C'est un effort très différent du VTT et j'ai trouvé cela mentalement très compliqué. Souvent on arrive au pied d'une bosse et on sait qu'il n'y aura pas de pause pendant 1 heure, qu'on ne devra jamais s'arrêter de pédaler. En VTT, on a de temps en temps un virage ou une descente où l'on s'arrête de pédaler pour récupérer quelques secondes. Bien sûr, on ne récupère pas vraiment mais on relâche la pression quelques instants et cela fait du bien mentalement. Mais sur les cols, c'est vraiment autre chose.

Ce que j'ai appris aussi, c'est que le peloton attaque les bosses à un rythme monstrueux. Souvent je ne voyais pas comment c'était possible de monter à ce rythme-là lorsqu'on entamait la bosse. Si tu ne te mets pas la selle dans le cul à ce moment-là, c'est fini, tu ne reviens jamais ! Ce n'est pas évident de faire juste mais grâce à mon équipe je m'en suis bien sorti et j'ai appris énormément. Et c'est aussi grâce à cet apprentissage et ma bonne capacité de récupération que j'améliorais mes classements étape après étape.


Il y a eu pour toi un changement d'équipe, le confinement, c'était forcément très particulier. Comment est-ce que tu as géré tout cela ?

En rejoignant la Conti FDJ, j'ai commencé une collaboration avec Joseph Berlin-Semon, qui est devenu mon entraîneur. Il a fallu apprendre à se connaître et au départ il a été assez prudent sur la charge qu'il me faisait faire à l'entraînement. Je lui disais que j'en voulais plus, mais on a augmenté très progressivement. Je suis assez perfectionniste et parfois j'avais du mal à m'endormir car j'avais l'impression de ne pas en avoir assez fait dans ma journée. Je lui ai même écrit des pâtés par e-mail pour lui expliquer, en gros, que j'avais l'impression de m'endormir sur mes acquis. Mais au final, passés les débuts c'était vraiment très bien, j'ai eu une très belle progression.

Le confinement, il ne m'a pas posé de problème. Au contraire, j'en ai profité pour passer du temps avec la famille dans un petit chalet au bord du lac. L'hiver, entre l'armée et les stages d'entraînement, je n'avais pas pu passer de temps avec eux. Cette pause m'a permis de le faire mais aussi de rouler des heures assez librement, comme j'aime le faire. Il faisait beau alors j'ai fait des semaines à 28 heures voire 30 heures. Chaque semaine j'avais mon objectif d'une séance de 200 kilomètres pour découvrir de nouvelles régions. J'ai vraiment kiffé cette période. Les courses n'ont commencé à me manquer que sur la fin.

Souvent, on me parlait de programme, mais je refusais totalement d'y penser. Je ne voyais pas l'utilité de dépenser mon énergie à préparer des courses qui s'annulent et être déçu. Je me suis concentré à améliorer mes capacités physiques générales et à profiter de la météo. Je n'ai pas pensé aux courses avant qu'elles recommencent réellement afin de garder une certaine fraîcheur mentale.


Entre le VTT et la route, tu as une préférence ?

J'aime bien les courses par étapes sur la route. En VTT, tu fais une très grande préparation pour 01H30 de course et si tu as le moindre souci, tout est terminé. Sur une course par étapes, tu as une chance chaque jour, tu peux te battre pour les étapes, pour le général, pour les maillots distinctifs. Tu peux te rattraper en cas de souci. Et avec les jours, tout le monde devient cramé, tu dois gérer au mieux pour récupérer et faire le job aussi à côté de la course. Cette sensation de rouler sur la fatigue, c'est quelque chose que j'adore. Par contre, sur route j'aime nettement moins les courses d'un jour. Mais par étapes, c'est vraiment différent.

Après en VTT, c'est généralement le meilleur qui gagne alors qu'en route, on peut être le meilleur physiquement et totalement passer au travers parce que la tactique n'était pas parfaitement juste. En route, tous les jours c'est un autre vainqueur alors qu'en VTT, c'est à peu près 4 coureurs qui se partagent toutes les Coupes du Monde depuis 10 ans.


Tu es dans l'équipe réserve de la World Tour FDJ. Hormis sur les courses du World Tour, les coureurs de la réserve peuvent être alignés avec l'équipe principale. Est-ce que cela a déjà été évoqué pour toi ?

Non, pas encore. Je ne suis pas encore au courant de mon calendrier. Je pense et j'espère qu'il y aura des courses avec l'équipe World Tour, mais je ne sais pas encore lesquelles. La FDJ est mon employeur, c'est donc à l'équipe de décider. Après, j'ai toujours le VTT et la route à concilier. Pour l'aspect VTT, j'ai réussi pour la saison prochaine à me libérer de toutes obligations. C'est-à-dire que j'ai refusé d'avoir un salaire de mon équipe VTT afin qu'il me soit possible, si cela devait être nécessaire, de ne faire aucune course VTT. Si l'on a un salaire, on a forcément des obligations et si l'on a trop d'obligations, on risque de s'épuiser. Donc j'ai préféré avoir des primes pour mes résultats à la place.

Donc, la FDJ décidera mais je sais qu'ils écouteront aussi mes envies car c'est une équipe saine qui laisse le choix aux coureurs. Là par exemple, je sors d'une période avec des ennuis de santé (ndlr : infection virale inconnue, puis coronavirus) et j'ai pu leur faire confiance à 100%. Je sais que ce n'est pas une équipe qui va me griller en me mettant sur le vélo alors que je ne suis pas totalement remis. Il y a eu un médecin qui avait prédit que je devrais respecter 3 mois d'arrêt. Heureusement, cela n'a pas été aussi long, mais cela n'aurait pas été un problème pour l'équipe.


Le VTT est une discipline que tu imagines pratiquer encore longtemps ?

Au niveau continental, je peux avoir 2 contrats dans 2 disciplines différentes comme actuellement avec la Conti FDJ et Thömus. Mais si je devais passer à l'échelon supérieur, ce ne serait plus possible. Donc on verra à ce moment-là. En 2020 déjà, l'équipe FDJ m'avait proposé de monter une petite structure VTT pour moi. Mais j'ai refusé, car être le seul coureur de sa structure, c'est difficile. Quand on se rend sur une course, le staff ne se déplace que pour moi, contrairement à si on a une vraie équipe. Si je suis seul dans mon équipe et que je me loupe, j'aurais l'impression d'avoir pris du temps à des personnes pour rien.

Avec Thömus j'ai un staff très pro et la concurrence de coureurs élites dans ma propre équipe, comme avec Mathias Flückiger. Cela me permet d'apprendre et d'avoir une bonne ambiance. Ce sera encore comme ça en 2021, mais je n'ai volontairement prolongé le contrat avec eux que d'une année. À la fin de la saison 2021, mon contrat avec la Conti FDJ se terminera également et je pourrai donc décider librement de mon avenir pour 2022.


Est-ce qu'il y a des courses qui te font particulièrement rêver pour la saison prochaine ?

Oui, il y a les championnats du monde de VTT, les championnats du monde du CLM, le Baby Giro et le Tour de l'Avenir. J'ai à cœur de faire ces courses. Peut-être, si tout se passe vraiment bien, que cela pourrait être ma dernière saison U23 et si c'est le cas j'ai vraiment à cœur de bien terminer dans cette catégorie.


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